23ème dimanche du temps ordinaire – 5 septembre 2021
Ce weekend nous avons travaillé avec l’EAP élargi un texte sur la Parole de Dieu, l’Écriture. Je crois que cela était providentielle, parce que justement l’évangile de ce dimanche est d’une certaine manière une invitation à redonner toute sa place à l’Écriture dans notre vie.
En écoutant cet évangile on pourrait se dire : « encore un miracle ! » Pourquoi l’évangéliste saint Marc a cru bon de nous raconter tout particulièrement celui-ci ? En effet, que Jésus soit capable de guérir on le sait depuis le début de l’évangile, or pour mémoire nous en sommes bientôt au milieu. Marc ne prends pas le temps de tous nous les raconter, car il y en a eu de nombreuses et de plus impressionnante. Ici la guérison parait bien banale par rapport à la multiplication des pains.
De plus, en relisant cet évangile avec attention on s’aperçoit qu’il y a pleins de détails étonnant. Par exemple, on ne sait rien de la personne qui a été guérie, ni son nom, ni ce qu’elle fait. Souvent au contraire on le sait (Jaïre, Bartimée…). Ensuite, Jésus a une étonnante manière de le guérir, on lui demande de « poser la main sur lui » mais lui met « les doigts dans les oreilles, et avec sa salive lui touche la langue » et il « soupire ».
Tous ces détails nous alertent un peu… qu’est-ce que saint Marc veut nous montrer, quel est son message ?
Tout s’éclaire si on prend un peu de hauteur et que découvre plus largement l’évangile. La grande question que Marc nous pose dans son évangile c’est comment devenir disciple de Jésus : « toi qui veux devenir disciple (c’est-à-dire tout simplement chrétien) attention voilà le chemin à parcourir ». Or, justement, au moment où nous en sommes dans l’évangile cela ne se passe pas très bien entre Jésus et ses disciples. Les disciples ne comprennent plus Jésus. Or, si on regarde ce qui se passera un peu après notre évangile, on découvre que Jésus va soupirer devant une question des pharisiens, et que juste ensuite, devant une incompréhension des disciples il leur dira : vous avez des oreilles et vous n’entendez pas.
Petit à petit on est amené à découvrir que si Marc ne nous a pas donné le nom de cet homme sourd et muet c’est que pour lui, le véritable malade que Jésus doit guérir ce sont ses disciples. Ce sont les disciples qui ont besoin d’être guéri de leur incapacité à bien parler. Oui les disciples sont sourds au sens qu’ils n’entrent pas vraiment dans l’enseignement de Jésus, ils n’écoutent pas vraiment donc, ils « parlent mal », ils parlent selon leurs opinions, leur sensibilité, mais non pas en « porte-parole » du Christ.
Les disciples pouvaient croire qu’en laissant tout pour suivre Jésus ils avaient fait le plus difficile. On découvre aujourd’hui qu’il n’en est rien. Que le plus gros reste à venir, être capable d’entendre la Parole du Christ, pour parler correctement, c’est-à-dire comme lui aurait parlé.
Cet évangile est donc bien actuel pour nous chrétiens engagés. Dans notre cheminement de foi il y a pu avoir des actes assez forts que nous avons posé pour nous engager, pour prendre au sérieux notre foi, des actes qui nous ont fait devenir membre de notre communauté, chrétien. Cet engagement, cette prise au sérieux, s’ils sont très beaux, demeurent un point de départ. En essayant de continuer à grandir dans la foi, on sera amené à faire l’expérience qu’au bout d’un certain moment cela coince avec Jésus, que nous ne sommes plus sur la même longueur d’onde, que nous avons du mal à l’écouter à le comprendre.
Mais la Bonne Nouvelle du jour est que justement Jésus peut nous guérir. Et saint Marc nous révèle comment Jésus s’y prend, pour vaincre cette résistance Jésus est obligé de donner de sa personne, de rentrer en contact avec son humanité en touchant les oreilles et en mettant de sa salive dans la bouche. Concrètement cela veut dire, que pour devenir pleinement disciple, Jésus va incessamment faire entrer en contact son humanité avec la nôtre. Et que dans ce contact il y aura notre guérison. Cela Jésus l’a fait en touchant concrètement cet homme. Il l’a fait en prenant du temps avec ses disciples, en vivant très concrètement avec eux, dans une très grande proximité.
Pour nous aujourd’hui en 2021 ce contact avec l’humanité du Christ nous pouvons le vivre tout particulièrement au travers de la lecture des évangiles, de l’Écriture. Prendre le temps de lire un évangile c’est d’une certaine manière comme laisser Jésus mettre son doigt dans mon oreille et sa salive sur ma langue. En effet, en lisant un évangile je vais toucher l’humanité de Jésus, ses paroles, ses actions, et normalement je ne resterai pas vraiment indemne de ce contact. Je pourrai être émerveillé, mais aussi bien souvent heurté, étonné. Mais dans ce contact au fur et à mesure Jésus va transformer mes oreilles et ma langue pour me permettre de l’écouter et d’être son véritable porte-parole.
Marc Monrozier, curé