Un temps pour adorer

“Il y a un moment pour tout, et un temps pour chaque chose sous le ciel” Qo 3,1

Adorer pour moi c’est prendre du temps pour se mettre en présence de l’Époux. C’est lui rendre un culte fervent non pas dans l’abstrait mais au contraire en commençant par lui remettre tout ce qui fait ma vie, mes préoccupations, mes désirs. Ensuite c’est goûter l’intensité de son écoute, sa tendresse qui guérit. Enfin c’est tout simplement demeurer en sa présence qui est paix joie consolation allégresse.

L’adoration du Saint sacrement n’est qu’une des formes possibles de l’adoration. L’essentiel est ailleurs. C’est ce dont je voudrais vous parler.

La première fois que j’ai vécu une véritable adoration c’était dans une petite chapelle aménagée dans un ancien sanatorium. Tout le côté gauche était vitré et donnait sur une campagne vallonnée. Le ciel orangé annonçait la venue prochaine du soleil. Les quelques retraitants qui s’étaient levés à l’aurore, restaient en silence dans une relative obscurité, attendant l’heure des Laudes.

Ce matin-là, celui que j’adorais de tout mon cœur c’était Celui qui avait réclamé ma vie à la tombe et qui me couronnait d’amour et de tendresse (Ps 102). Depuis un an déjà je lui offrais un sacrifice d’action de grâce en participant à la messe dominicale. Mais là, je faisais l’expérience silencieuse d’un cœur à cœur au-delà des mots, simplement d’esprit à Esprit dans la vérité nue de ma petitesse.

Notre Dieu nous aime chacun d’un amour personnel et singulier. Autant de personnes, autant de circonstances uniques et si intimes. Il n’y a pas de méthode pour adorer mais encore faut-il savoir reconnaitre cette soif au fond de nous qui ne dit pas toujours son nom.

Pour illustrer cette quête Je vous propose maintenant un extrait du livre “Sagesse d’un pauvre” du frère franciscain Éloi LECLERC. Il s’agit d’un dialogue entre Saint François d’Assise et l’un de ses premiers compagnons frère Léon.

— Notre sœur l’eau ! s’exclama François en s’approchant du torrent. Ta pureté chante l’innocence de Dieu.
Sautant d’un rocher à l’autre, Léon eut tôt fait de traverser. François le regarda et vit de la tristesse sur son visage.
— Tu as l’air songeur lui dit François. Sais-tu ce qu’est la pureté du cœur ?
— C’est ne pas avoir de faute à se reprocher, répondit Léon sans hésiter.
— Alors je comprends ta tristesse dit François. Car on a toujours quelque chose à se reprocher.
–Oui dit Léon et cela me fait désespérer d’arriver un jour à la pureté du cœur
— Ah ! frère Léon, crois moi, repartit François, ne te préoccupe pas tant de la pureté de ton âme. Tourne ton regard vers Dieu. Admire-le. Réjouis-toi de ce qu’il est, lui, toute sainteté.
— Dieu, cependant, réclame notre effort et notre fidélité fait observer Léon.
— Oui, sans doute, répondit François. Mais la sainteté n’est pas un accomplissement de soi. Elle est d’abord un vide que l’on accepte et que Dieu vient remplir.
— Comment faire ? demanda Léon.
— Il faut simplement ne rien garder de soi-même. Tout balayer. Accepter d’être pauvre. Ne plus voir que la gloire du Seigneur et s’en laisser irradier. Le cœur devient alors léger. Il a abandonné tout souci, toute inquiétude. Son désir de perfection s’est changé en un simple et pur vouloir de Dieu.

Quand deux cœurs se rejoignent le temps est aboli, seul subsiste le présent. Passé et futur retournent à leur véritable inconsistance.

Depuis j’ai appris à profiter de tous ces moments de la journée où nous devons attendre : ascenseur, embouteillage, etc… je sais que ce sont des moments privilégiés pour rejoindre Notre Seigneur. Par exemple chez le dentiste plus question de m’absorber dans la lecture des magazines.

Alors prendrez-vous un peu de temps pour adorer ?

Peut-être que Dieu vous répondra comme le renard dans le Petit Prince de Saint-Exupéry : “s’il te plaît apprivoise-moi.”

Daniel – de la route prière